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PapJazz 2025 : une bouffée d’air frais pour des Haïtiens ?

  • 8 avr.
  • 3 min de lecture

Initialement prévu du 21 au 23 mars, le PapJazz a été reporté en raison de la détérioration de la situation sécuritaire du pays. Finalement, l'événement s’est tenu au Karibe les 5 et 6 avril 2025, en présence d’un public enthousiaste et engagé. Le PapJazz a été une bouffée d’oxygène pour certains Haïtiens, une pause dans un pays qui a du mal à respirer.




Samedi 5 avril, à 16 h 30, l’heure de la respiration a débuté sur la scène Prestige avec le PapJazz. Des groupes tels que Jazz X Tension et Friends, qui combinent slam et jazz, ont ouvert le bal, diffusant leurs vibrations dans un public affamé de sons vivants. La journée s’est terminée avec Nanm Vodou A, un groupe qui nous rappelle nos valeurs et nos racines à travers une performance ancrée, puissante et spirituelle. Chaque artiste a insufflé une énergie positive à Haïti. Ceux de Slam & Jazz avec leurs messages puissants dans SOS, Alerte Urgence, et Nanm Vodou A avec Bat tenèb pou Ayiti. La musique n’était pas juste divertissement, elle était message, témoignage et acte de foi.


Le dimanche 6 avril, au Karibe, sur la scène Barbancourt, l’oxygène du PapJazz a de nouveau envahi la salle à partir de 16 h 30. Amijazz feat Gardyn Mercier a joué du jazz avec élégance. Puis vinrent Joël Akoustik et ses invités : Alexa Cherrelus, Fameuse Maude, Ti Sax, un doux mélange de talents. Finalement, Kolo & Co a conclu la soirée avec une énergie si intense que, le temps d’une chanson, on a oublié le chaos et la terreur qui sévissent dans le pays. Les intermèdes avec la bande Rara ont ajouté une touche de tradition, un rappel que nos racines aussi ont leur mot à dire dans le tumulte.


Ce week-end-là, on a vu des gens danser avec des larmes dans les yeux. Des visages marqués par la fatigue ont éclaté de rire. On a entendu des cris de joie, mais, derrière ces cris, il y avait un écho, celui des cris du cœur. Car, en Haïti, même quand tout brûle, on danse encore. Même quand on pleure, on rit. Même lorsque la peur cherche à tout engloutir, on ose encore s’aimer, espérer et rêver. Ce n’est pas de l’insouciance. C’est de la résistance.


Chaque chanteur, chaque musicien a lancé un cri pour Haïti. Un tambour, comme une prière. Une guitare, comme un soupir. Une batterie, comme un cœur qui s’emballe. Un saxophone, comme un souffle ardent. Et une voix, toujours une voix, pour dire ce que tant de gens n’osent plus dire : « Potoprens viv, solino viv, tèritwa pèdi yo viv. » pour prêter les dires de Slam et Jazz. La directrice générale du Festival international de jazz de Port-au-Prince, Milena Sandler, et le président de la Fondation Haïti Jazz, Joël Widmaier, n’avaient pas prévu une telle affluence pour cette 18e édition.


Malgré tout, les Haïtiens veulent vivre. Ne pas juste survivre, mais vivre pleinement. Danser, chanter, se rassembler et respirer. Ce festival a rassemblé des âmes fatiguées, mais debout, venues dire, dans chaque note, chaque applaudissement : « Nou la. N’ap kenbe. Nou vle viv. » Au PapJazz, les regards se sont illuminés, les corps ont bougé, les esprits ont esquissé un souffle. La musique a agi comme une médecine de l’âme, un rappel que, même dans la tempête, le droit à la joie est sacré. C’est là que réside la force des Haïtiens : cette capacité à créer du beau dans la douleur, à transformer l’oppression en mélodie. Comme le dit ce proverbe haïtien : « Tout tan tèt pa koupe, nou gen espwa met chapo. »


Le Festival de jazz PapaJazz 2025, qui s’est déroulé sur deux jours seulement, a pourtant marqué les esprits. Deux jours bien animés, rythmés par la musique, le partage et les émotions. Mais, au fond, c’était bien plus que cela. C’étaient deux jours de liberté dans un pays pris en otage par des gangs armés qui terrorisent les populations civiles. Deux jours où les éclats de rire ont osé braver la peur. Ces deux jours, les notes ont remplacé les cris. Une partie d’Haïti a repris son souffle, même un instant. Quant à l’After au Quartier latin, que dire ? C’était une dernière gorgée d’oxygène, une dernière danse avec la vie, avant de replonger dans cette réalité : celle où les terroristes transforment le pays en enfer.


Anne-Aise VILME


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